Lecture d’image : savoir analyser la lumière sur une image

Dans le premier travail du classeur, nos étudiants doivent de décrire la lumière qu’ils observent sur le cliché : est-elle directe ou indirecte ? Diffuse ou réfléchie ? Intense ou douce ? Latérale ou en contre-jour ? Cet exercice est utile pour observer et comprendre la lumière et les différents effets qu’elle produit, afin d’être capable, avec de la pratique, de savoir se positionner (ou positionner son sujet) par rapport à elle afin d’obtenir le résultat ou le style d’ambiance souhaités. Pas toujours évident lorsqu’on débute de savoir analyser et décortiquer cette lumière. D’autant que, il y a toujours ou presque plusieurs types de lumière dans un cliché, à commencer par un mélange de lumière directe et indirecte. Il peut aussi y avoir plusieurs sources de lumière dans une même scène : une principale qui éclaire la majeure partie de la scène (lumière du jour baignant une pièce par exemple) et des sources secondaires (des lampes sur une table, des bougies, un néon). Il peut donc y avoir aussi un mélange de lumière naturelle et artificielle. Comment donc s’y retrouver pour décrire la lumière dans une image ?

Quelques éléments sont à prendre en compte :
– Comment la lumière arrive sur le sujet principal de l’image ?
– Quelle est la source principale de lumière dans le cliché ?
– D’où provient la source de lumière par rapport au placement du photographe et de son objectif ? Ce facteur est donc lié à sa position dans la scène et son angle de prise de vue.

Comment définir le sujet principal d’une image :
Bien que cela reste à nuancer au cas par cas, en règle générale c’est celui qui occupe une place importante dans le cadre, celui qui retient l’attention, ou encore, celui sur lequel la mise au point (netteté) est faite. Par exemple dans le cas d’un portrait, on va décrire la lumière par rapport au personnage, à la façon dont elle se pose sur lui et non pas par rapport à un détail situé à l’arrière-plan du cliché. On va donc décrire la lumière « principale » faisant écho ici au sujet « principal » de l’image. Concrètement, si on photographie un modèle en contre-jour (la lumière est donc située derrière lui et se découpe telle une silhouette plus ou moins sombre), et bien c’est une photographie en contre-jour. Même si à l’arrière-plan on distingue un néon qui produit une petite lumière latérale secondaire (elle a moins d’importance dans le cliché) cette image reste un contre-jour. Voyons en image un exemple :

Ci-dessus, quel est le sujet principal ? La zone comprenant l’homme et la fenêtre, qui sont éclairés en contre-jour. Quelle est la source principale de lumière ? Toujours celle arrivant en contre-jour depuis la fenêtre. Bien que le mur de droite soit éclairé aussi latéralement, d’une part, par la lumière des marches qui se réfléchit sur le mur de céramiques, et, dans une moindre mesure, par un peu de lumière venant de la gauche. La source principale, elle, reste en contre-jour (= située derrière le sujet, mais face à votre objectif). Si on veut être précis, on dira même que cette image est un mélange de lumière directe en contre-jour, et de lumière indirecte réfléchie. Oulala ça se complique ! Pas vraiment, c’est en vérité très simple :

Lumière directe et indirecte
Quelle est la différence entre les deux ? La lumière directe vient éclairer directement le sujet sans qu’aucun obstacle entre elle et lui ne fasse barrage. Dans l’image ci-dessus, la lumière vient bien directement éclairer le personnage par l’arrière (donc en contre-jour), elle vient directement aussi se poser sur le sol et les premières marches, elle est donc directe à cet endroit du cliché. En revanche, sur notre mur de droite, elle est indirecte et réfléchie ! Ce ne sont pas les rayons de lumière directe passant au travers de la fenêtre qui viennent éclairer le mur mais la lumière directe projetée au sol et sur les marches qui repart vers le haut et les cotés, et vient se réfléchir sur la surface lisse et brillante des carreaux de céramique qui ornent le mur. Pour prendre une métaphore simple, c’est comme une balle rebondissante : quand vous la lancez, elle atteint directement le sol en un premier point d’impact, et lorsqu’elle rebondit et vient frapper le mur, elle le frappe indirectement (puisque le mur n’était pas sa cible de départ) et dans un second temps. Le deuxième point d’impact de la balle (sur le mur), n’est qu’une conséquence du premier point d’impact (qui visait le sol). La lumière indirecte peut donc elle aussi être envisagée comme une conséquence : elle provient de matériaux et surfaces qui ont d’abord absorbés une certaine quantité de lumière directe qu’ils ont reçue et qui, ensuite, en rejettent une plus faible quantité (celle qui n’a pas été absorbée). Cette lumière « rejetée », qui repart dans une autre direction vient donc rebondir (comme notre balle) sur les surfaces et objets alentours. C’est la lumière indirecte. A noter : plus la surface est sombre (par exemple une table noire) plus elle absorbe la lumière directe et ne renverra que très peu de lumière indirecte sur les surfaces alentours. A contrario plus la surface est claire ou brillante, plus elle renvoie de lumière indirecte. C’est la raison pour laquelle les réflecteurs photos sont blancs, argentés ou dorés.

Lumière diffuse et réfléchie
Ces deux types de lumière subissent une transformation, une modification avant de venir éclairer le sujet. On l’a vu plus haut, la lumière indirecte est celle de la lumière réfléchie, que ce soit par un réflecteur, un miroir, un mur blanc, une flaque d’eau (ceux-ci vont en réfléchir beaucoup) mais aussi par toutes les surfaces et objets qui absorbent tous et renvoient tous de la lumière (dans des intensités différentes selon qu’il sont clairs ou foncés, mats ou brillants). La lumière diffuse quant à elle, et comme son nom l’indique, désigne une lumière directe qui va être diffusée, atténuée par une surface ou une matière en passant à travers elle avant de venir éclairer votre sujet.  Elle va donc transpercer cet obstacle, mais ses caractéristiques en seront alors modifiées et atténuées, elle sera plus douce et plus homogène. Par exemple : un voilage blanc, placé devant une fenêtre qui adoucira la lumière provenant de celle-ci, ou encore un ciel couvert chargé de nuages qui filtrera la lumière, réduisant la force de ses rayons, celle-ci arrivera donc au sol nettement diminuée. La lumière diffuse est donc au départ de la lumière directe, qui passe par un obstacle plus ou moins transparent, qui la filtre, la floute, l’atténue, pour devenir une lumière plus douce. Tous ces éléments vous permettent normalement d’y voir plus clair désormais. Mais ce n’est pas terminé, qu’en est-il des différentes directions que peuvent prendre la lumière et comment parvenir à les identifier ? On rappelle que l’on décrit toujours la source de lumière principale (celle qui prend le plus de place dans le cadre et pas la bougie qu’on entre-aperçoit dans un coin) et qu’on tient compte aussi du sujet principal de notre image (pas du passant qui fait 2mm au fond du cliché et sur lequel la lumière arrive peut-être autrement). Voici quelques exemples de ce qu’on appelle lumière latérale, frontale, en plongée, oblique, en contre-jour. Une astuce fort utile pour aider à déterminer la direction de la source de lumière consiste à observer les ombres dans le cliché.  Selon leur taille, la direction qu’elles prennent, le fait que leurs contours soient nets ou flous, on pourra évaluer précisément d’où vient la lumière et si elle plutôt forte ou douce.

Le contre-jour :

La lumière se situe derrière le sujet, et donc face au photographe et à son objectif. On peut dire que le sujet est pris en sandwich entre la lumière et le photographe. Conséquence : le sujet forme une silhouette assez sombre (si on a exposé pour les hautes lumières), et si elle est visible, son ombre portée au sol se dirige vers le photographe.

La lumière latérale :

Qu’elle vienne de la gauche ou de la droite, elle produit des ombres allongées au sol (qui vont évidemment vers la gauche si la lumière est latérale depuis la droite, et qui se dirigent vers la droite si la lumière provient de la gauche !). Notez qu’on parle de la façon dont la lumière arrive sur le sujet mais évidemment c’est aussi en fonction du placement du photographe par rapport à ce sujet. Prenons le cas de l’image des mariés, prise sous cet angle, la lumière est latérale depuis la droite. Mais le photographe de mariage qui faisait le shooting et qui était placé en face des mariés (situé donc à droite hors champ), lorsqu’il faisait sa photo, comment la lumière venait-elle éclairer le couple à votre avis ? C’était une lumière frontale. Elle venait en effet éclairer frontalement, de face, l’homme et la femme. On constate donc que l’on décrit non seulement la lumière selon la manière dont elle se pose sur le sujet, mais, et c’est bien sûr intimement lié, aussi selon la position que le photographe a choisie par rapport à la provenance de la lumière.
Autre exemple, avec une même scène, mais un placement différent du photographe sur les lieux :

Ci-dessus, il s’agit d’un contre-jour

Mais cadré de la sorte en changeant de place, la lumière est latérale depuis la gauche.

Le placement du photographe et son angle de prise de vue déterminent donc la façon dont on va décrire la lumière du cliché. Ici, ce n’est pas la lumière qui a changé de provenance, mais le photographe qui a modifié son positionnement par rapport à elle.

Lumière en plongée :

Celle-ci vient du dessus par rapport au sujet. Dans l’exemple, le soleil était au zénith dans ce ciel d’été vers midi. Elle produit des ombres très courtes (à la différence des ombres très allongées produites par d’autres directions de lumière).

Lumière frontale :

Située en face du sujet mais derrière le photographe, elle vient éclairer frontalement le sujet, ce qu’on voit clairement ici sur les piliers en pierre du pont.

Lumière oblique :

Elle vient d’assez haut en le ciel mais pas tout à fait du dessus (contrairement à la lumière en plongée). Elle se situe environ à 45° à gauche ou à droite. Elle produit des ombres allongées, obliques, qui viendront dessiner des diagonales au sol.

Il existe aussi la lumière en contre-plongée, venant du dessous, c’est par exemple le cas des éclairages artificiels installés sur des façades de bâtiments, souvent anciens (le palais de justice, la mairie, un château) et leur donne un caractère dramatique et inquiétant. Il y a aussi le cas de la lumière rasante, soleil très bas dans le ciel, au coucher du soleil par exemple. Ou bien dans des situations où un filet de lumière vient affleurer un sujet, une matière et en révéler les détails. Le dessus des cheveux par exemple, dans certains contre-jour parfois, peut être auréolé de cet effet lumière rasante, on distingue presque chaque cheveu de manière très fine.

Voilà désormais de quoi vous plonger dans l’analyse de la lumière ! Prenez le temps d’observer vos images, ou même celles que vous voyez dans la presse ou dans un livre, pour vous habituer à jouer le jeu de deviner de quel type de lumière il s’agit (directe ou indirecte), sa source (naturelle ou artificielle),  sa qualité (diffuse, réfléchie), son intensité (vive ou douce) et ses directions (latérale, oblique…).

Images illustrant l’article ©Soizic MENUT